lundi 13 avril 2015

Projet de Loi Renseignement

Alors que l'Assemblée Nationale commence aujourd'hui l'examen (en procédure accélérée) du projet de loi Renseigement un sondage indique que 63% des Français seraient favorables à une restriction des libertés pour lutter contre le terrorisme.

Le sondage a été réalisé par CSA sur internet entre le 8 et le 10 avril 2015 sur un échantillon national représentatif de 997 personnes âgées de 18 ans et plus peut on lire dans le descriptif.Mais ce qui frappe le plus dans les résultats de ce sondage c'est que les gens interrogés ne savaient pas trop manifestement de quoi il s'agissait :
Étant comme bon nombre de nos concitoyens j'ai essayé d'en savoir un peu plus sur ce projet de loi, accusé d'ouvrir la porte à Big Brother par certains, devenu nécessaire depuis les attentats de janvier dernier selon le gouvernement et un bon nombre de parlementaires.

Tout d'abord de bonnes choses :
  • la mise en place d'une Commission qui pourra donner un avis a priori à des demandes de surveillance, mais cet avis sera consultatif. Le Premier Ministre sera le dernier à autoriser ou non la mise en place de dispositif d'écoute. Toutefois cette Commission pourra être saisie par n'importe quel citoyen se sentant faire l'objet d'une surveillance pour savoir si tel est le cas ou non.
  • la définition des rôles des champs d'action des différents services de renseignement et des causes pouvant déclencher le processus de surveillance :
« 1° La sécurité nationale ;
« 2° Les intérêts essentiels de la politique étrangère et l’exécution des engagements européens et internationaux de la France ;
« 3° Les intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France ;
« 4° La prévention du terrorisme ;
« 5° La prévention de la reconstitution ou du maintien de groupement dissous en application de l’article L. 212-1 ;
« 6° La prévention de la criminalité et de la délinquance organisées ;
« 7° La prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique.
 la formulation de ces raisons, notamment la dernière fait craindre par certains que tout et n'importe quoi puisse être considéré comme faisant partie du point 7. Ainsi Libération dans son excellent test "Loi sur le Renseignement : pourriez vous être espionné ?" traduit ce point 7 par "participation à une manifestation contre les violences policières", et explique que dans ce cas, on risquerait :

Si vous n'êtes pas identifié :
  • Les services de renseignement peuvent utiliser une valise espionne qui simule une fausse antenne téléphone, «un Imsi-catcher» pour savoir qui vous êtes.
Si vous êtes déjà identifié :
  • Des écoutes téléphoniques, fax et mails... y compris via une valise espionne qui simule une fausse antenne téléphonique, un Imsi Catcher.
  • Les «métadonnées» peuvent être demandées aux opérateurs et hébergeurs : qui appelle qui ou qui se connecte à quoi, quand, combien de temps, où.
  • La mise en place d'une balise pour suivre un véhicule ou un objet.
  • Mise en place de «filatures» (photos et enregistrements sonores) dans des lieux privés type cafés, bibliothèques etc.
  • Installation d'un mouchard («keylogger») sur les ordinateurs : il capte toutes les touches frappées sur le clavier.
  • Pose de micros et de caméras au domicile.

pour aller plus loin dans la compréhension on peut aussi lire l'article de Guillaume Champeau sur Numerama qui explique cette histoire de "lmsi-catcher". Un lmsi-catcher c'est en fait une valisette qui se place entre les téléphones portables et les antennes relais et qui enregistre non pas les conversations mais toutes les données de communication (numéro du correspondant, durée de l'appel)


Donc si on revient à mon histoire de manifestation qui pourrait être considérée par le pouvoir comme une menace, les forces de l'ordre auraient la possibilité de déployer une valisette, et d'intercepter l'ensemble des échanges téléphoniques passés dans un rayon de 500 à 1 km de la dite manifestation que vous participiez ou non à la manifestation d'ailleurs, la valisette est est balèze mais pas au point de trier entre manifestants et badauds à une rue plus loin. C'est le principe de la pêche au chalut. Qui s'applique dans le reste de la Loi : car l'autre pendant de la surveillance de masse prévue c'est la mise en place de boites noires chez les fournisseurs d'accès internet. Là c'est pareil, chaque utilisateur sera susceptible de voir l'ensemble de ses mouvements sur internet surveillés. Si un de ces mouvements paraît suspect, les forces de l'ordre pourront demander la levée de l'anonymat et lancer une véritable opération de surveillance.

Et si jamais dans votre entourage plus ou moins proche vous êtes amené à croiser la route d'une personne faisant l'objet d'une surveillance, vous pourrez vous-même finir par être surveillé.

Donc si on résume, finalement on nous prépare une NSA à la française... Honnêtement, n'ayant personnellement rien de malhonnête à me reprocher du moins le pensè-je, je suis pas sûr de faire partie des 63%  de Français favorable à réduire mes libertés pour lutter contre le terrorisme.

si vous non plus vous ne souhaitez pas trop voir ça aboutir, vous pouvez toujours signer cette pétition.


Ah et une dernière chose, si vraiment tu ne peux pas vivre sans téléphone, et que tu souhaites te rendre à une manifestation potentiellement surveillée, numérama t'a dégotté une application androïd qui t'avertira de la présence de lmsi catcher dans le secteur au visuel un peu anxiogène tout de même :





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9 commentaires:

  1. Ah ! Enfin un vrai billet travaillé sur le sujet !

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  2. je reprends mon commentaire de chez Fred (je suis une feignasse)

    On peut penser autrement que Russel Banks.

    On peut s'interroger comme il le fait sur le "comment des jeunes de nos villes sont devenus des tueurs" mais on peut aussi et surtout vouloir encadrer et surveiller les réseaux de façon à prévenir.

    Ces terroristes sont sans foi ni loi ne croient en rien et sèment la mort par soumission à un ordre religieux extrémiste. On laisse faire ? Quand on sait que tout ou presque passe par les réseaux et qu'en 2 secondes on peut dialoguer avec un ou n interlocuteurs à Bagdad, Kaboul, Damas, etc.... on est en droit de se demander comment peut-on suveiller les menaces potentielles.

    Quant à ceux qui cri "Liberté" à tout va je dirai que quand on a rien à se reprocher .... on a rien à craindre.

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    1. Jeff est-ce que j'ai dit qu'il fallait laisser faire ? mais je suis désolé la surveillance généralisée n'est jamais une solution, et que ce soit un gouvernement de gauche qui le mette en place me laisse dubitatif.
      sur le "quand on a rien à se reprocher, on a rien à craindre" cet argument ne m'est pas recevable, c'est du Orwell

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  3. Oui , on a toujours quelque chose à se reprocher ... Orwell l'a bien montré ... On est tous coupable tant qu'on n'a pas fait la preuve de son innocence ... La surveillance rend libre ...

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